La Grande Belleza, ou quand le costume épouse le 7ème art

Jep Gambardella, incarné par Toni Servillo, est un journaliste spécialisé dans les costumes et critiques d’arts, présent régulièrement aux soirées les plus glamour de la movida de Romese donnant pour objectif d’avoir le pouvoir « de faire chuter les mondains ».

Jep erre sans but parmi les illusions et les déceptions d’une Rome où la dolce vita a disparu depuis longtemps. Gambardella est comme le personnage de Mastroianni dans le film de Fellini, mais encore plus désabusé, plus âgé. Pas moins élégant pour autant.

La mise en scène de Sorrentino capte non seulement la splendeur décadente de Rome, mais aussi l’allure raffinée et décontractée de son protagoniste. Servillo porte son personnage avec une grâce désintéressée et quelque peu épuisée, ressemblant à un homme du monde qui a tout vu.

La mélancolie et le vide dus à un trop plein de savoir donnent l’occasion au personnage de se tourner vers des désirs plus simples, du moins en apparence. Le souvenir de son premier amour le hante, et Jep cherche ainsi à comprendre les raisons de l’amour dans un océan de nostalgie.

Le style Gambardella

Mais Jep est un homme élégant qui est peut-être fatigué de tout, et peut-être même de s’habiller, mais qui dispose encore d’une garde-robe enviable dont il serait dommage de se passer.

De l’habit en lin blanc au bleu du soir, en passant par le rouge et le moutarde des vestes fendues sur quelques pantalons blancs : Jep Gambardella a une garde-robe colorée mais de haute sartoria.

Les costumes de Gambardella viennent en effet tous de la même maison : Attolini, la sartoria de Casalnuovo dans la banlieue de Naples. Ce tailleur fut le costumier des personnages masculins pour le film et mit un point d’honneur à ce que les accessoires soient soigneusement choisis.

Vestes, chemises, cravates et pochettes, unies ou à motifs, à double boutonnage, à simple boutonnage et Prince-de-Galles, lunettes hyper serrées et accessoires… le style Gambardella était né !

Comme chacun sait, les Napolitains sont de grands experts en couture et en art sartorial. Même si cela était plus visible il y a quelques générations, Naples reste encore aujourd’hui la capitale italienne du costume.

On notera par ailleurs qu’il existe un lien très fort entre Naples et Londres. Beaucoup de ceux qui pouvaient se le permettre envoyaient leurs chemises se faire repasser et amidonner à Londres. Il se disait même qu’une chemise repassée à Londres ne se repassait plus ailleurs !

Les vêtements de la Grande Belezza ont été choisis par l’acteur lui-même, précisément en raison de la réputation de la prestigieuse boutique Attolini, où a été forgée la première veste de style napolitain en 1930 : savoir créer des vêtements à la personnalité unique et au raffinement intemporel.

 

Jep porte un mouchoir dans la poche de poitrine, comme c’était la coutume il y a 50 ans. La façon dont il met la cigarette entre ses lèvres, la façon dont il croise ses jambes pour mettre en valeur le bas bicolore avec la chaussette assortie révèlent des manières démodées, mais diablement efficaces.

Pour les lunettes, Gambardella opte pour Luxottica, absolument « sartorial cut » et donc en parfaite harmonie avec la tenue. Les chapeaux sont de Florentine Marzi tandis que les cravates sont de Tino Cosma. Enfin, les chaussures, toujours bicolores, sont de Tod’s et Hogan.

Ces vêtements à la grâce qui se disputent à la beauté se marient de façon pure et intemporelle aux différents plans du réalisateur, au point que chacun d’entre eux est un hommage aux plus grands vers des plus grands poètes.

Article écrit par Sacha

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